Prière chiite vs Prière sunnite : Quelles sont les différences ?

La prière chiite vs prière sunnite est un sujet souvent abordé par les chercheurs et les musulmans curieux de comprendre les différences pratiques au sein de l’islam. Les deux traditions partagent la même base coranique et la même importance de la salât, mais elles se distinguent dans certaines modalités héritées de l’histoire et des écoles juridiques.

Ces divergences concernent autant les ablutions, la lecture de la Fatiha, le placement des mains, que les prières surérogatoires. Comprendre ces différences permet non seulement d’éviter les confusions, mais aussi d’apprécier la richesse de la diversité islamique.

Qu'est-ce que le chiisme ?

Les points communs entre la prière chiite et sunnite

Malgré les différences de détails et d’écoles juridiques, la prière chez les chiites et les sunnites repose sur une base commune solide. Ces points partagés montrent l’unité fondamentale des musulmans dans leur adoration d’Allah.

  • Les deux traditions accomplissent cinq prières quotidiennes obligatoires : Fajr (2 unités), Dhuhr (4), Asr (4), Maghrib (3) et Isha (4).
  • Les piliers essentiels de la prière sont communs : intention (niyya), Takbir al-Ihram, récitation, inclinaison (ruku‘) et prosternation (sujud).
  • La récitation de la sourate al-Fatiha est centrale dans les deux rites.
  • La position debout, l’inclinaison et la prosternation suivent la même structure de base.
  • Les prières débutent toutes par « Allahu Akbar » et se terminent par le salut final (as-salamu ‘alaykum wa rahmatullah).
  • Le rôle de la prière est le même : se rapprocher d’Allah, purifier le cœur et affermir la foi.

Ces éléments communs soulignent que, malgré des différences de pratique, la prière reste une adoration unificatrice au cœur de l’islam, vécue par tous les musulmans comme une rencontre spirituelle avec leur Créateur.

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Les différences principales

Même si la base de la prière est identique, plusieurs différences existent entre les deux traditions. Voici les principales distinctions :

  • Les ablutions (Wudu)
  • L’Adhan et l’Iqama
  • Lecture du Bismillah
  • Lecture de la Fatiha
  • Lecture d’une sourate après la Fatiha
  • Lecture à voix haute ou basse
  • Position des mains (Taktouf)
  • Dire « Amine »
  • Le Qunut
  • Le Salam final
  • L’endroit de la prosternation (Sujud)
  • Les piliers de la prière
  • Les temps de prière
  • Le Tashahhud et la Salat
  • Les prières surérogatoires
  • La prière de Tarawih

Différence 1 : Les ablutions (Wudu)

Chez les sunnites, les ablutions se font en lavant les bras de bas en haut, c’est-à-dire des doigts jusqu’au coude. De plus, ils lavent leurs pieds entièrement lors du wudu. Cette pratique est largement répandue dans les quatre écoles sunnites et considérée comme une obligation.

Chez les chiites, les ablutions diffèrent : les bras sont lavés de haut en bas, de l’arrière du coude vers le bout des doigts, et les pieds ne sont pas lavés mais essuyés (mas’h). Selon les juristes chiites, laver les pieds invalide le wudu.

Cette divergence trouve son origine dans l’interprétation des versets coraniques relatifs aux ablutions et des traditions transmises par Ahl al-Bayt (a).

Dans la vidéo ci-dessous, je vous explique l’origine de la différence entre les ablutions sunnites et celles des chiites :

 

Différence 2 : L’Adhan et l’Iqama

Chez les sunnites, l’adhan du fajr est appelé deux fois : une première avant l’aube, afin de réveiller et préparer les fidèles, et une deuxième au moment de l’entrée réelle du temps.

De plus, dans l’adhan, l’expression « Hayya ‘ala khayr al-‘amal » a été supprimée par le calife ‘Umar et remplacée par « As-salatu khayrun min an-nawm » (la prière vaut mieux que le sommeil). L’iqama suit ensuite pour annoncer le début de la prière.

Chez les chiites, l’adhan doit être prononcé uniquement après l’entrée effective du temps de la prière. L’expression « Hayya ‘ala khayr al-‘amal » est conservée, comme cela se faisait à l’époque du Prophète (s).

Concernant la formule « Ashhadu anna ‘Aliyyan waliyyullah », elle n’est pas considérée comme une partie obligatoire de l’adhan, mais il est permis de la dire en signe de reconnaissance du wilaya de l’Imam Ali (a).

Dans la vidéo ci-dessous, j’analyse l’origine de cette différence d’après les sources sunnites et chiites :

 

Différence 3 : Lecture du Bismillah

Pour les chiites, « Bismillah ar-Rahman ar-Rahim » est un verset faisant partie intégrante de chaque sourate du Coran (sauf la sourate at-Tawbah).

Ainsi, il doit être récité dans la prière et son omission rend la prière invalide. Même dans les prières dites silencieuses, les chiites recommandent de le dire à voix haute, en signe de distinction et de respect pour ce verset.

Chez les sunnites, les avis divergent. Les hanafites, hanbalites et malikites considèrent que le Bismillah n’est pas un verset de la sourate, et qu’il peut être omis sans conséquence sur la validité de la prière.

Les shafi‘ites, en revanche, le reconnaissent comme partie intégrante et rendent sa récitation obligatoire. Dans la pratique, beaucoup de sunnites le récitent à voix basse, même dans les prières à voix haute.

Différence 4 : Lecture d’une sourate après la Fatiha

Chez les chiites, il est obligatoire de réciter une sourate complète après la Fatiha dans les deux premières rak‘a de chaque prière obligatoire. Cette règle vise à préserver l’intégralité de la récitation coranique pendant la prière et reflète la rigueur de l’école ja‘farite.

Chez les sunnites, les avis varient. Les hanbalites estiment que réciter la Fatiha seule est suffisant et qu’ajouter une autre sourate n’est pas obligatoire.

Les autres écoles considèrent la récitation d’une sourate après la Fatiha comme recommandée mais non obligatoire, à l’exception des shafi‘ites qui rejoignent l’avis chiite en la rendant obligatoire.

Lisez plus : Quelles sont les croyances islamiques d’après les chiites ?

Différence 5 : Lecture à voix haute ou basse

Selon les chiites, il est obligatoire de réciter la Fatiha et la sourate à voix haute dans les prières du Fajr, du Maghrib et de l‘Isha (spécifiquement pour les hommes). À l’inverse, dans les prières du Dhuhr et du Asr, il est obligatoire de réciter à voix basse.

Cette règle stricte est appliquée par tous les juristes chiites et ne s’applique que sur Al-Fatiha et la sourate qui la suit et non les autres dhikrs dans la prière.

Chez les sunnites : Les hanafites, par exemple, laissent le choix au fidèle de réciter à voix haute ou basse. Les shafi‘ites suivent la même règle que les chiites.

Quant aux malikites et hanbalites, ils considèrent la récitation à voix haute comme simplement recommandée pour certaines prières, mais pas obligatoire.

Différence 6 : Position des mains (Takattuf)

Chez les chiites, le fait de croiser les mains sur la poitrine ou sous le nombril pendant la prière rend celle-ci invalide. Les bras doivent rester détendus le long du corps.

Chez les sunnites, la position des mains varie selon les écoles. Les hanafites croisent les mains sous le nombril, les shafi‘ites et hanbalites les placent sur la poitrine, et les malikites ont l’habitude de laisser les bras détendus, rejoignant ainsi la pratique chiite.

Dans tous les cas, le takattuf est vu comme recommandé mais pas obligatoire.

Lisez plus : Pourquoi y a-t-il plus de sunnites que de chiites ?

Différence 7 : Dire « Amine »

Chez les chiites, prononcer « Amine » après la récitation de la Fatiha dans la prière est considéré comme interdit. Selon les juristes, cela invalide la prière car ce mot ne fait pas partie des paroles prescrites par le Prophète (s) ni enseignées par Ahl al-Bayt (a).

Chez les sunnites, dire « Amine » est au contraire recommandé, voire fortement encouragé. Dans de nombreuses mosquées sunnites, l’assemblée le dit collectivement et à voix haute après la Fatiha, surtout dans les prières à voix haute.

Différence 8 : Le Qunut

Chez les chiites, la récitation du Qunut est une pratique recommandée dans toutes les prières obligatoires quotidiennes. C’est un moment de supplication et de proximité avec Allah, récité avant l’inclinaison (ruku‘) de la deuxième rak‘a.

Chez les sunnites, la pratique diffère. Les hanafites et hanbalites réservent le Qunut uniquement à certaines occasions, comme la prière du Witr. Les shafi‘ites et malikites le pratiquent surtout dans la prière du Fajr. Dans la majorité des cas, il n’est pas intégré à toutes les prières quotidiennes.

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Différence 9 : Le Salam final

Chez les chiites, le salam final se dit en restant face à la qibla, sans tourner la tête. Le musulman termine la prière par la formule « As-salamu ‘alaykum wa rahmatullah » en gardant la concentration et la direction.

Chez les sunnites, il est recommandé de tourner la tête à droite pour le premier salam, puis à gauche pour le second, de sorte que le visage soit visible depuis l’arrière.

Cette pratique est considérée comme une sunna dans toutes les écoles, avec de petites variations selon les traditions.

Différence 10 : L’endroit de la prosternation (Sujud)

Chez les chiites, la prosternation doit se faire sur la terre ou sur ce qui pousse de la terre à condition que cela ne soit ni comestible ni utilisé comme vêtement. Le meilleur support reste la terre, en particulier la terre de Karbala (turbah).

La prosternation sur des tapis, coussins ou vêtements est considérée invalide.

Chez les sunnites, la prosternation peut être faite sur différents supports tels que le tapis de prière, la moquette ou même des vêtements. Il n’est pas nécessaire que le front touche directement la terre, ce qui rend leur pratique plus souple sur ce point.

 

 

Différence 11 : Les piliers de la prière

Pour les chiites, les piliers de la prière sont au nombre de cinq : l’intention (niyya), le Takbir al-Ihram, la position debout au moment du takbir et avant l’inclinaison (qiyam), l’inclinaison (ruku‘) et les deux prosternations (sujud). La négligence de l’un de ces piliers invalide la prière.

Chez les sunnites, les piliers de la prière sont généralement réduits à quatre : la position debout, la récitation, l’inclinaison et la prosternation. Certains ajoutent l’intention, mais la structure de base reste plus condensée que dans l’école chiite.

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Différence 12 : Les temps de prière

Les chiites considèrent qu’il est permis de regrouper les prières du Dhuhr avec le Asr, ainsi que celles du Maghrib avec l’Isha, même sans raison particulière.

Toutefois, il est recommandé de les accomplir chacune à son temps spécifique, sauf en cas de besoin ou de voyage.

Chez les sunnites, le regroupement des prières n’est accepté que dans certaines circonstances précises, comme lors du pèlerinage à Arafat et Muzdalifah, ou en cas de voyage.

En dehors de ces cas, chaque prière doit être accomplie strictement à son heure.

Différence 13 : Le Tashahhud et la Salat

Chez les chiites, le Tashahhud inclut le témoignage de foi suivi de la salutation sur le Prophète (s) et sa famille : « Allahumma salli ‘ala Muhammad wa Aali Muhammad ».

Cette formule est considérée obligatoire pour la validité de la prière.

Chez les sunnites, la version du Tashahhud varie selon les écoles. La mention explicite de « Aali Muhammad » n’est pas toujours incluse dans leurs formulations. Cela conduit à une divergence sur la complétude de la prière selon la perspective chiite.

Différence 14 : Les prières surérogatoires

Chez les chiites, les prières surérogatoires (nawafil) sont nombreuses : 34 unités quotidiennes s’ajoutent aux 17 obligatoires. Ces prières sont facultatives et visent à renforcer le lien spirituel avec Allah.

Chez les sunnites, les prières surérogatoires quotidiennes sont moins nombreuses et appelées « rawatib ».

Selon plusieurs écoles, certaines de ces prières sont considérées comme fortement recommandées, voire proches du statut d’obligation, et leur abandon est vu comme une négligence.

Lisez plus : C’est quoi la différence entre sunnite et chiite ?

Différence 15 : La prière de Tarawih

Chez les sunnites, la prière de Tarawih est pratiquée pendant le mois de Ramadan, généralement en 20 unités, et elle est accomplie en groupe dans les mosquées.

Cette pratique est attribuée au calife ‘Umar qui l’a instituée comme prière collective.

Chez les chiites, les prières surérogatoires du Ramadan se font individuellement et non en groupe. La pratique collective de la Tarawih est considérée comme une innovation introduite après le Prophète (s), raison pour laquelle les chiites ne la pratiquent pas.

Différence 16 : La prière surérogatoire du Witr

Chez les sunnites, il est considéré que la prière du Witr, composée de trois unités, est obligatoire après la prière de l’Isha. Cette pratique est vue comme faisant partie intégrante des prières quotidiennes et elle occupe une place importante dans la jurisprudence sunnite.

Chez les chiites, la prière du Witr est une prière surérogatoire (mustahabb) et non obligatoire. Elle fait partie des nawafil de la nuit (Salat al-Layl) et se récite seule, après d’autres unités surérogatoires.

Bien qu’elle soit très recommandée spirituellement, son abandon n’invalide pas la pratique religieuse obligatoire.

Comment prier correctement de manière chiite ?

La prière selon la tradition chiite respecte des règles précises transmises par le Prophète (s) et les Imams d’Ahl al-Bayt (a). Elle inclut des détails spécifiques dans l’adhan, la récitation, les gestes et la prosternation, afin de conserver la forme authentique de la salât.

Suivre ces enseignements permet de prier de façon conforme et complète.

👉 Visionnez la vidéo ci-dessous sur ma chaîne YouTube pour apprendre la prière chiite étape par étape.

 

 

Où apprendre la prière et le fiqh chiite ?

Apprendre à prier correctement ne se limite pas aux gestes : il est aussi essentiel de connaître les règles du fiqh chiite qui encadrent la prière, la pureté, le jeûne et les autres obligations.

Mon institut islamique Razva propose un cursus complet de 6 modules de fiqh, couvrant tous les chapitres, avec l’avis de 6 marja‘, des références coraniques et des hadiths authentiques.

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Quels livres lire pour apprendre la prière ?

Pour approfondir vos connaissances sur la prière et la jurisprudence chiite, plusieurs livres fiables et accessibles sont disponibles. Voici une sélection recommandée :

Livre 1 : Initiation à la jurisprudence chiite
Auteur : Sayed Muhammad Saghir al-Husayni
Pages : 104

Livre 2 : Le guide pratique du musulman
Auteur : L’ayatollah Sayyid Ali Sistani
Pages : 550

Livre 3 : Enseignement du Fiqh
Auteur : Muhammad Hussein Fallah Zadeh
Pages : 256

Livre 4 : Comment Accomplir sa prière
Auteur : Kamal El-Sayed
Pages : 56

Conclusion

La prière, qu’elle soit chiite ou sunnite, reste au cœur de l’islam et unit les croyants autour de l’adoration d’Allah. Les différences que nous avons vues ne doivent pas être une source de division, mais un moyen de mieux comprendre nos traditions respectives.

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Seyed Ali Mousavi

✍️ Rédigé par :

Seyed Ali Mousavi

Spécialiste en sciences islamiques et chiites depuis 2004, je partage réflexions, savoirs et perspectives sur Le Chiisme.
Avec une plume inspirée et une vision éclairée, j'invite chaque âme à explorer l'islam et à cheminer vers un monde meilleur.

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